Peintres Parisiens

 - Exposition d'œuvres récentes

Peintres Parisiens

Exposition d'œuvres récentes

Février - Mars 1932

Kunstsalon Wolfsberg, Zürich

Nous assistons depuis peu ä un nouveau "tournant" de la peinture. L'évènement s'est accompli avec vivacité, mais non sans murmures. Un genre a succédé au genre précédent selon les règles des révolutions artistiques, devant un public formé aux variations de régimes, — un public d'amateurs éclairés, blasés, cependant jamais déçus par un changement.

Jugez donc: depuis plus de vingt ans se sont déroulés, à notre ébahissement, les combinaisons les plus étranges, les plus invraisemblables, qui toutes revendiquaient la qualité d'inédit — nous vîmes des auteurs accéder précipitamment aux fonctions de Chef d'École, exercer une dictature éphémère, puis céder le pas à un maître au génie plus singulier, car en cas temps faciles surgit une génération spontanée de pseudo-génies. La critique joua un rôle retentissant, elle était obligée de tout expliquer par a + b, ce qu'elle fit de bonne grâce, non sans forme et talent; d'ailleurs les peintres eux-mêmes se chargeaient d'initier les masses à la quintessence de leurs inspirations. Sur ces sujets bien des choses intelligentes furent écrites, et la peinture avança dans la voie de la philosophie. Le malheur est que la peinture relève du sentiment plutôt que la pensée, de la perception plutôt que de la déduction. Les peintres peuvent donner de la besogne à ceux qui témoignent du désir louable de former des théories, mais leur action ne doit pas s'appuyer sur la théorie.

II est curieux de constater que durant la période héroïque dite d'indépendance — relativement courte — les auteurs se sont appliqués à retrouver presque dans l'ordre les étapes de l'enfantement de l'art, à évoquer les œuvres de la préhistoire, de l'âge des cavernes, à remanier les tentatives édifiantes des peuplades primitives, nègres, océaniennes, samoyèdes, etc...

L'on vient de s'aviser que les artistes qui cherchent à exprimer leur émotion à l'échelle humaine de beauté, ne sont pas à négliger. La notion d'humanité dans l'art réapparait avec la puissance de la dernière originalité. On découvre avec ravissement les paysages, les visages, le standard du corps humain. Cela est fort bien. Après un voyage circulaire à travers les temps immémoriaux, et les domaines de l'imagination délirante, la peinture retrouve son identité. Une révision sévère des valeurs s'opère.

Les "jeunes" pour la plupart ont refusé les stériles leçons des aînés excentriques, incomplets et doués. Ils ont haussé les épaules devant les élucubrations pittoresques, ils ont négligé la recherche des "succès du jour", de la trouvaille décorative, pour des satisfactions plus profondes. Répudiant une vaine et impossible indépendance, ils ont voulu des patrons doués d'authentique génie.

Nous sommes heureux de présenter ici une équipe valeureuse composée de peintres — aux talents divers, bien personnels — qui affirment de plus en plus leur maîtrise, précisément par des œuvres venues de conceptions sensibles de la nature et d'une vision humaniste.

MARCEL ZAHAR

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